Dans l’une de ses nombreuses conférences en ligne, le savant de l’islam égypto-allemand Hamed Abdel-Samad analyse la personnalité du prophète Mahomet, dont la biographie, dit-il, est « retenue captive dans une prison de sur-sanctification et de glorification injustifiées ». Abdel-Samad, qui estime qu’ « il ne peut y avoir de réforme ou de nettoyage de l’héritage [islamique] tant que nous n’aurons pas débarrassé Mahomet et le Coran de cette sainteté », décrit le prophète Mahomet comme un être humain animé de motivations et de désirs humains . « Avait-il des problèmes conjugaux ? Des problèmes psychologiques ? Quelque maladie ? Nous l’ignorons », dit Abdel-Samad, qui considère que les révélations de Mahomet reflètent « la psychologie d’un homme malade et rejeté, d’un marginal ». La conférence a été mise en ligne le 24 juin 2015. Extraits :
Abdel-Samad : Selon moi, les musulmans sont les otages de l’histoire de la vie et la personnalité de Mahomet. Il les a atteints d’une manière anormale. Toutes les choses qu’il a dites et faites, et toutes les erreurs qu’il a commises, suscitent des erreurs encore aujourd’hui. Mais l’opposé est également vrai. La personnalité et la biographie de Mahomet sont aussi des otages dans une prison bâtie par les musulmans, une prison de sur-sanctification et de glorification injustifiées. Quoi que vous fassiez, vous ne devez pas critiquer le Messager d’Allah, et quiconque ose le faire périt.
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Une des histoires commence quand le Prophète Mahomet va à la mosquée et trouve devant une femme abattue. « Qui a fait cela ? », demande-t-il. Un homme aveugle s’avance et dit : « Je l’ai tuée, ô prophète d’Allah. C’était ma femme esclave ; elle m’a donné deux fils qui sont comme des perles, mais elle t’a maudit, ô messager d’Allah. Je ne saurais tolérer cela, alors je l’ai tuée. » Mahomet s’est levé et a dit : « Vous en êtes témoins, son assassinat a été autorisé. »
Voilà une étrange conception de la justice. Nous parlons de l’assassinat d’un être humain, de l’assassinat d’une femme. L’homme qui l’a tuée aurait pu le faire pour n’importe quelle raison, puis se rendre auprès du Prophète et lui dire : « J’ai fait cela car elle t’a maudit. » Cela a suffi au Prophète pour déclarer que son assassinat était autorisé. Pas de procès ? Pas de témoins ? Non. Un être humain est tué comme cela. Que cette histoire soit réellement arrivée ou non, elle figure dans le patrimoine islamique et sert de preuve.
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En raison de cette glorification de Mahomet, vous ne pouvez débattre des problèmes de l’islam et de son origine, car dès que vous touchez à ces sujets, on vous dit : Qui êtes-vous pour critiquer le Prophète d’Allah ? C’est du blasphème. C’est refuser des choses obligatoires en islam. Ainsi les musulmans sont retenus prisonniers de Mahomet et vice-versa, et personne ne sait comment sortir de ce pétrin. Selon mon propre avis, il ne peut y avoir de réforme ou de nettoyage du patrimoine si nous ne débarrassons pas Mahomet et le Coran de cette sainteté.
Il y a beaucoup de tournants dans l’histoire de la vie de Mahomet, et ces tournants l’ont affecté sur le plan psychologique. C’est un aspect que les musulmans refusent toujours d’aborder. Est-il possible que Mahomet ait eu des problèmes psychologiques et existentiels ? « Non », disent-ils. « Le Prophète était parfait. » Non, il ne l’était pas. Il était humain, tout comme vous et moi. Il était animé par des motivations humaines, par des motivations psychologiques, par des désirs. Une fois que nous comprenons cela, nous pouvons comprendre ses lois, l’évolution du Coran et de sa biographie.
Pourquoi ne s’est-il marié qu’à 25 ans ? Nous lisons dans sa biographie que lorsqu’il était jeune, il a demandé la main de sa cousine en mariage. C’était la fille de son oncle, Abou Taleb, qui l’a élevé après la mort de sa mère et de son autre oncle, Abd Al-Muttalib. Son oncle Abou Taleb a décidé de l’élever. Mais lorsqu’il a demandé la main de sa fille en mariage, Abou Taleb a refusé. Pourquoi ?
Mahomet était contrarié. Il demande à son oncle : Pourquoi l’as-tu mariée à Hubeyra et pas à moi ? Il parle du point de vue d’un être humain humilié. C’est très important si nous voulons comprendre la psychologie de la prophétie à venir. Cette personne était un rejeté. Il n’était pas aimé. Il avait des problèmes au sein de sa propre famille. Son propre oncle a refusé de le donner en mariage à sa fille. Lorsqu’il a demandé à son oncle : « Pourquoi l’as-tu mariée à Hubeyra et pas à moi ? », Abou Taleb a répondu : « L’honorable s’allie à l’honorable. » En d’autres termes, il lui a dit : Mahomet, tu n’es pas honorable.
Le second tournant fut son mariage avec Khadija. Le même problème s’est reproduit. Khadija avait 15 ans de plus que lui. Elle avait 40 ans à cette époque. Elle était mariée avant de devenir veuve. Elle avait des enfants de ses précédents mariages. Une femme comme cela aujourd’hui, dans n’importe quel pays arabe, aurait eu des difficultés à trouver quelqu’un qui accepterait de l’épouser. Et ici, nous parlons de l’élite, de la tribu des Bani Hashem, de l’ « homme digne de confiance » et de toutes ces jolies choses… Mais son père a dit : « Non. »
Selon l’histoire racontée dans Musnad Ahmad ibn Hanbal, Khadija a donné à son père à boire du vin jusqu’à ce qu’il soit saoul. Elle l’a habillé et a teint sa barbe avec du henné, et lorsqu’il s’est réveillé le lendemain, [Khadija et Mahomet] étaient mariés. Il est devenu fou furieux et a voulu prendre son arme, mais elle lui a dit de ne pas les embarrasser…. Le fait est que lorsqu’une femme a recours à un tel subterfuge pour se marier à un homme, c’est que cet homme a manifestement un problème. Quel était ce problème ? Nous l’ignorons. Beaucoup d’éléments ont été retirés des biographies prophétiques, et nous ne pouvons savoir de quoi il s’agissait.
Quel fut le tournant suivant de la vie de Mahomet ? Il s’est marié à Khadija et a mené une vie stable. Il est devenu marchand et voyageait vers le Levant. Il avait alors de l’argent. Et cela aurait dû s’arrêter là. Il avait une vie stable, et tout allait bien. Mais à 40 ans, il a eu une crise et nul n’en connait la cause. Lorsque un homme quitte son travail, sa maison, s’en va dans le désert, ou dans quelque montagne, et s’isole dans une cave, c’est forcément qu’il fuit une crise, même si nous ignorons laquelle. Avait-il des problèmes conjugaux ? Des problèmes psychologiques ? Quelque maladie ? Nous l’ignorons, mais il y a eu un tournant à l’âge de 40 ans. Il a commencé à faire des choses très bizarres. Par exemple, il a dit qu’une pierre a parlé. Lorsque je dis assalaam alaykum, la pierre répond alaykum assalaam. Si quelqu’un disait cela aujourd’hui, nous l’emmènerions directement chez le psychiatre.
[…]
Mahomet était ingénieux et malade à la fois. Il a réussi à faire quelque chose de bien de sa maladie. Je ne veux pas analyser la personnalité de Mahomet et dire qu’il était criminel et violent. Non. Je dis qu’au fond, c’était un orphelin délaissé, qui a souffert d’humiliation et de privation lorsqu’il était enfant. Il voulait compenser cette déficience. Pour lui, la révélation fut une opportunité… C’était exactement comme la cave, un endroit où se cacher. C’était comme toutes les femmes qu’il allait ensuite épouser. Elles lui servaient d’endroit où se cacher après la mort de sa mère.
Lorsque nous abordons le sujet de la personnalité de Mahomet, nous ne devons pas oublier l’aspect humain. La première pensée qui lui est venue à l’esprit n’était pas qu’il s’agissait d’une révélation et que Dieu lui parlait. Au début, il a cru que c’était Satan. Il allait commettre un suicide. Les livres islamiques nous le disent. Il se tenait au sommet d’une montagne et s’apprêtait à se jeter dans le vide, quand il a vu Jibril assis sur une chaise… Voyez le genre d’idées qu’il avait… Et Jibril lui a dit : Tu es le Messager d’Allah. Ne te tue pas. Tu ferais mieux de descendre de là. Khadija a pris le relais. Comme il n’y avait pas de clinique psychiatrique à la Mecque, elle a fait office [de clinique]. C’est elle qui lui a dit : C’est une révélation. Tu es un prophète. Tu vas bien.
Dix ans après la prétendue « révélation », Khadija est morte. C’e fut un tournant majeur dans la vie de Mahomet. Après la mort de Khadija, Mahomet s’est radicalisé sur le plan politique, idéologique, moral et mental. D’étranges choses ont commencé à lui arriver après la mort de Khadija.
Après Surat Al-Jinn, une autre surah décrit un miracle. Dans la Surat Al-Isra, il monte un étrange animal – moitié mule, moitié âne – tout au long de la route vers la mosquée Al-Aqsa, où il a officié une prière de tous les prophètes, y compris d’Abraham, le père de tous les prophètes, et d’Adam, le père de l’humanité. C’était le sommet de l’honneur. C’est le genre de choses dans la biographie du Prophète qu’un musulman entend, et laisse passer.
Personne ne peut seulement envisager que peut-être cette révélation, toute cette histoire, soit un reflet psychologique du rejet et de la perte. L’homme venait de perdre sa femme, l’être le plus cher qu’il avait, et son oncle Abou Taleb est mort le même mois, d’ailleurs… Tous ceux qui le soutenaient étaient partis. Il est allé à Talif, où il s’est fait lapider. La logique voudrait que l’homme commence à halluciner, à développer une mégalomanie. Non seulement les djinns [créatures dotées de pouvoirs surnaturels] croient en lui, mais le Seigneur a arrêté les lois naturelles de l’univers, et lui a permis de monter un cheval volant jusqu’à Jérusalem, puis de monter vers le Paradis, et d’en redescendre… C’est la psychologie d’un homme malade et rejeté, d’un marginal.
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