Le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov devant la Douma : « Les Etats-Unis et leurs alliés tentent de créer un front dissuasif contre la Russie sur la base de préceptes hérités de la Guerre froide »

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Le 15 juin 2016, le ministre russe des Affaires étrangères Sergey Lavrov a prononcé un discours devant la Douma, la chambre basse du Parlement fédéral russe. Dans ce discours, Lavrov a averti que “les partenaires occidentaux, menés par les Etats-Unis, redoublent d’efforts pour parvenir à la domination mondiale”, alors même que l’Occident ne peut plus faire autrement que “d’admettre l’importance” de la coopération avec la Russie.

Lavrov a souligné le fait que la Russie ne serait plus impliquée dans des confrontations avec les Etats-Unis, l’OTAN ou l’UE, ajoutant que “la confrontation et les jeux géopolitiques à somme nulle entravent l’évolution du monde vers la stabilité et le développement et génèrent des crises comme celle en Ukraine”. Lavrov a réitéré le leitmotiv du Kremlin – la nécessité de créer un espace économique et humanitaire commun s’étendant de l’Atlantique au Pacifique et d’harmoniser les processus d’intégration européen et eurasien.

Au cours de la séance de questions-réponses avec les médias, différents sujets ont été abordés, parmi lesquels la situation en Libye, les accords de Minsk, le respect inspiré par la nouvelle “soft-power” russe, les relations Russie-Chine, le taux de natalité russe et le tournoi de l’UEFA en 2016. Concernant ce dernier point, il faut noter que le ministre des Affaires étrangères russe a convoqué l’ambassadeur français à Moscou, Jean-Maurice Ripert, pour protester contre la détention de 43 citoyens russes, après qu’ils eurent pris part à de violents affrontements de rue contre des supporters britanniques dans la ville de Marseille. Le ministère russe des Affaires étrangères a expliqué que cet incident suscitait des sentiments anti-russes. Le communiqué de presse a indiqué que “le diplomate français a été informé de la nature discriminatoire des mesures prises à l’encontre de citoyens russes par le procureur de Marseille… Le ministère russe des Affaires étrangères considère aussi comme inacceptable le fait que les bureaux du consulat russe en France n’aient pas été informés… Le diplomate français a également été informé que la poursuite de la diffusion de sentiments anti-russes au sujet de la participation de l’équipe russe à l’Euro 2016 pourrait porter gravement atteinte aux relations franco-russes”.[1]


Extraits du discours de Lavrov et de la séance de questions-réponses :[2]

Lavrov : Nous voyons nos partenaires occidentaux, conduits par les Etats-Unis, redoubler d’efforts pour parvenir à la domination globale

« …Je voudrais souligner le fait qu’une interaction étroite entre le ministère des Affaires étrangères et le Parlement, les commissions concernées de la Douma et le Conseil de la Fédération, offre une opportunité non seulement de coordonner nos approches sur les questions essentielles à l’ordre du jour international, mais aussi de réaliser des efforts conjoints des branches exécutives et législatives pour renforcer au maximum la position de la Russie dans les affaires internationales.

Vous êtes bien entendu au courant de nos évaluations de la situation internationale qui ont été récemment exprimées à plusieurs reprises par le président Poutine, y compris au cours de ses récentes visites en Bélarus, au Kazakhstan, en Grèce et aussi lors du sommet Russie-ASEAN [l’Association des nations du Sud-Est asiatique] de Sochi [19-20 mai]. Le Président Poutine a parlé franchement, soulignant l’importance de freiner l’émergence d’un potentiel de conflit global et réaffirmant la volonté russe de coopérer avec tous les pays pour établir un système de sécurité internationale moderne indépendant des blocs.

Les relations internationales ont atteint un tournant dans leur développement, marqué par l’émergence d’une nouvelle architecture polycentrique. C’est une tendance objective qui reflète la diversité culturelle et civilisationnelle du monde moderne, la montée et le renforcement de nouveaux centres de pouvoir et d’influence et le désir naturel des nations de déterminer librement leur avenir. Dans le même temps, la concurrence globale se renforce et ses conséquences détermineront largement les contours du futur ordre mondial.

Dans le contexte des menaces terroristes grandissantes, des conflits régionaux et de l’instabilité économique persistante, nous voyons nos partenaires occidentaux, conduits par les Etats-Unis, redoubler d’efforts pour parvenir à la domination globale.

Les récents développements ont montré la nature illusoire de ces projets. Il est évident qu’aucun Etat, pas même le plus puissant au monde, et aucun groupe de pays, ne peuvent espérer être en mesure de traiter les nombreux problèmes modernes seuls.

Ce dont nous avons besoin dans cette situation, ce sont des efforts diplomatiques conjoints, fondés sur une véritable égalité entre les principaux acteurs internationaux, dans l’intérêt de trouver les meilleures réponses aux menaces et aux défis communs.

Cette philosophie et cette pratique de la politique étrangère sont mises en oeuvre par la Russie, qui protège ses intérêts nationaux dans une situation où les Etats-Unis et leurs alliés essaient de créer un “front dissuasif” contre la Russie, basé sur les préceptes de la Guerre froide. Mais ils ne peuvent plus faire autrement que d’admettre l’importance de la coopération avec la Russie, et l’importance de la position russe sur les questions actuelles.

Nous ne serons pas impliqués dans une confrontation avec les Etats-Unis, l’OTAN ou l’UE

Lorsqu’il s’était exprimé devant l’ONU en septembre dernier [2015],[3] le président Poutine avait proposé de créer un large front de contre-terrorisme sous les auspices des Nations unies et fondé sur le droit international.

Mettant cette initiative en pratique, nos Forces aérospatiales, qui sont déployées en Syrie à la demande du gouvernement syrien, ont combattu conjointement avec l’armée syrienne et les milices pour contrecarrer les plans des extrémistes visant à créer une tête de pont dans cette région stratégique du Moyen-Orient.

Il a fallu du temps à nos partenaires pour s’apercevoir de la gravité du défi posé par l’EI, Jabhat al-Nusra et les autres organisations similaires, ainsi que de l’importance de la coordination des efforts dans le combat contre eux. En fin de compte, une coopération pratique a été établie. Le Groupe de soutien international à la Syrie (ISSG) a été créé avec la Russie et les Etats-Unis comme co-présidents, et le Conseil de Sécurité des NU a adopté des décisions approuvant un plan global, qui prévoit un cessez-le-feu, un accès humanitaire aux civils dans les régions assiégées et un processus politique sans condition préalable ou interférence étrangère.

La Russie continuera de mener une politique ambitieuse, indépendante et responsable fondée sur la priorité du droit international, sur des solutions collectives aux problèmes internationaux et sur le rôle central des Nations unies et la reconnaissance du droit des nations à l’autodétermination.

Nous avons travaillé au sein de l’ONU, de la BRICS [association de cinq pays émergents importants : le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine et l’Afrique du Sud], l’OCS (Organisation de coopération de Shanghai)], le G20 et d’autres plate-formes multilatérales pour défendre un programme d’unification et une politique internationale équilibrée. Nous sommes toujours ouverts à une coopération égalitaire et mutuellement bénéfique avec tous les pays et associations qui le souhaitent.

Mais ne vous leurrez pas : nous défendrons la sécurité de notre pays et de notre peuple en toutes circonstances.

De nouvelles tentatives sont faites pour exercer des pressions sur nous, pour encourager des campagnes anti-russes dans le but de nous contraindre à abandonner nos conceptions sur l’ordre international, fondées sur nos principes et nos valeurs. Nous assistons à des tentatives visant à resserrer la discipline au sein de la région transatlantique à nos dépens, et à affaiblir simultanément les positions de la Russie en tant que rival sur les marchés de l’énergie et des armements.

Nous n’entrerons pas en confrontation avec les Etats-Unis, l’OTAN ou l’UE. Il est évident que la confrontation et les jeux géopolitiques à somme nulle entravent l’évolution du monde vers la stabilité et le développement, et génèrent des crises comme celle en Ukraine. Nous espérons que l’Occident a compris les dangers du soutien aux nationalistes radicaux et qu’il fera pression sur Kiev pour mettre en oeuvre les Accords de Minsk du 12 février 2015 au moyen d’un dialogue direct avec Donetsk et Lugansk. Nous sommes disposés à travailler de concert pour atteindre cet objectif et pour aider à créer des conditions favorables pour affronter les défis qui menacent l’Ukraine.

Les conflits dans la CEI, comme dans toute autre région, ne peuvent être résolus que par des moyens pacifiques, à savoir des méthodes politiques, diplomatiques et non militaires. Ceci s’applique à la crise en Ukraine et aux problèmes de Transnistrie et du Nagorno-Karabakh. L’élément principal est de respecter les accords conclus par les parties impliquées et d’empêcher qu’ils soient révisés.

Nous appelons tous les pays à travailler en vue de la création d’un espace commun économique et humanitaire s’étendant de l’Atlantique au Pacifique

Nous sommes convaincus qu’il serait plus facile de résoudre toutes ces crises si les défauts du système étaient surmontés par la coopération paneuropéenne, et si les lignes de division persistantes étaient éliminées. Nous appelons tous les pays à travailler en vue de la création d’un espace économique et humanitaire commun de l’Atlantique au Pacifique, qui reposera sur la sécurité égale et indivisible [de tous]. L’harmonisation des processus d’intégration européenne et eurasienne pourrait constituer une étape importante dans cette direction.

En dépit de certaines complications, l’Union économique eurasienne (EAEU) s’est mise en place en tant qu’organisation internationale moderne. Les décisions adoptées lors de la réunion du Conseil suprême économique eurasien le 31 mai ont fixé des objectifs de développement spécifiques pour ses Etats membres et sont destinés à améliorer leur compétitivité.[4] Nous concentrons également nos efforts sur la consolidation de l’Etat unifié de Russie et de Biélorussie, la garantie d’un fonctionnement efficace de l’Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC) et l’amélioration des résultats de la Communauté des Etats indépendants (CEI).

Les processus d’intégration au sein de la CEI ne sont pas au point mort. Conjointement avec nos partenaires, nous nous efforçons d’élargir les opportunités de projets mutuellement bénéfiques avec d’autres pays. Un accord sur la coopération commerciale et économique entre l’EAEU et la Chine est en cours de rédaction, ainsi qu’un accord de principe sur la recherche de moyens d’intégrer les projets de développement de l’EAEU et de la Ceinture économique de la route de la soie, et des pourparlers sont en cours pour créer des zones de libre échange avec de nombreux pays dans toutes les régions du monde.

De nouveaux horizons s’ouvrent à nous grâce à l’initiative du président russe Vladimir Poutine et au début des consultations entre les Etats membres de l’EAEU, de l’OCS et de l’ASEAN sur la création d’un partenariat économique eurasien global dans l’avenir. Cette idée a soulevé un vif intérêt lors du sommet ASEAN-Russie à Sochi, les 19 et 20 mai.

Dans le cadre de nos efforts futurs pour atteindre ces objectifs, nous nous fonderons sur notre partenariat stratégique avec la Chine, l’Inde et le Vietnam, et nous élargirons notre coopération avec d’autres pays de la Région Asie-Pacifique, notamment pour mettre en oeuvre nos projets ambitieux de développement de la Sibérie et de l’Extrême-Orient russe.

L’OCS devient un garant essentiel de la stabilité et de la sécurité régionale. Son potentiel deviendra encore plus important lorsque l’Inde et le Pakistan l’auront rejointe en tant que membres à part entière.

La consolidation du BRICS prend également de la vitesse. Ses membres sont en train de créer des mécanismes permanents de coopération et ils établissent des approches communes pour la démocratisation des relations internationales.

Lire la version intégrale en anglais, avec les questions- réponses

 

 

Acerca de MEMRI

El Instituto de Investigación de Medios de Información en Medio Oriente (MEMRI) explora el Medio Oriente a través de los medios informativos de la región.

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