Si l’émancipation ne s’est bien entendu pas faite en un jour, elle a finalement donné naissance à ce courant très spécifique et inspirant qu’est le franco-judaïsme. Une relation forte et longue lie les Juifs à la République, les Juifs et la République ne vont pas l’un sans l’autre.
Allocution du Président du Crif
Le Président du Crif, Yonathan Arfi a ouvert ce colloque en rappelant combien il était important d’installer cet événement dans le calendrier de nos institutions mais également dans le calendrier républicain. Cette date, qui jusqu’alors échappait à notre attention, est une date clé à célébrer chaque année.
Ce décret a notamment permis de mettre fin à l’éclatement des Français juifs et a donné naissance au franco-judaïsme dont nous sommes tous les héritiers.
Le Président du Crif a rappelé que le 27 septembre 1791 était « en quelque sorte notre date de naissance collective ».
Il a redit avec force que « la République et les Juifs ne vont pas l’un sans l’autre », d’où le choix de ce colloque : « Les Juifs dans la République : révélateur des crises du pacte républicain ? ».
« La vague d’antisémitisme qui frappe depuis le 7 Octobre n’échappe pas à cette règle. Elle est à la fois le révélateur et le catalyseur des crises françaises. » Après le 7 Octobre, les Français juifs ont eu le sentiment non pas d’une solitude juive mais d’une solitude républicaine.
Cet attachement à la République, à ses institutions et à son principe universaliste est fondateur pour le judaïsme français.
Vous pouvez retrouver le discours du Président du Crif en intégralité en cliquant ici.
Message vidéo du Président du Sénat, Gérard Larcher
Le Président du Sénat, dans son allocution vidéo, a rappelé que le décret d’émancipation des Juifs de France est « l’aboutissement d’une longue histoire entre la France et les Juifs » en mettant notamment en lumière la figure de Rachi « symbole du judaïsme en diaspora », celle de Condorcet et celle de l’Abbé Grégoire « qui appela à faire rentrer les Juifs dans cette famille universelle qui doit établir la fraternité entre tous les peuples ». La Troisième République en fondant la loi de 1905 sur la laïcité fut « la garante de l’émancipation des Juifs de France ». « N’oublions jamais » a-t-il ajouté « que dans chaque synagogue le samedi, on prie pour la République ». Menacée par les montées d’antisémitisme, comme ce fut le cas lors de l’Affaire Dreyfus, puis sous le régime de Vichy, l’émancipation peut encore être remise en cause.
Intervention du Grand Rabbin de France, Haïm Korsia
Ardent défenseur d’une meilleure connaissance de l’ancrage des Juifs en France, le Grand Rabbin de France, Haïm Korsia a salué l’organisation de ce colloque et rappelé combien il était important d’ « associer notre histoire contemporaine à un destin qu’on a oublié ».
« Toutes les valeurs que porte la France se retrouvent dans l’aspiration au meilleur du judaïsme ». Ainsi, « quand les deux sont fidèles dans la plus belle vision d’eux-mêmes, ils se rencontrent. »
Le Grand Rabbin de France a conclu son intervention en rappelant que les Français juifs ont « plaqué les combats du judaïsme aux combats de la France et c’est comme cela qu’on s’est construit ». Le judaïsme a la capacité de ne pas être une identité définie uniquement par telle ou telle chose ; c’est une identité universelle qui fait la richesse du judaïsme, et de la France.
Intervention de l’historien et sociologue Pierre Birnbaum sur le thème « De 1791 à nos jours : Français juifs, une passion républicaine »
L’historien Pierre Birnbaum a tenu un exposé très riche sur le thème « De 1791 à nos jours : Français juifs, une passion républicaine » en débutant son propos par le basculement de la Révolution française et l’introduction des Juifs à la Nation.
Dans la pratique, la République apprend à s’accommoder des différences pour peu qu’elles n’aillent pas à l’encontre de ses fondements. La logique est intégrationniste mais nullement assimilationniste. La République ne va imposer aux Juifs nul abandon à leurs croyances mais après la signature du décret par Louis XVI, les Juifs vont prêter serment, faisant ainsi une entrée exceptionnelle dans la modernité politique. Ils vont ainsi pouvoir incarner la gloire de la République, allant jusqu’à prier, comme l’a rappelé le Grand Rabbin de France, dans les synagogues pour la gloire et le bien-être de la République.
Les Juifs ne sont plus considérés comme une Nation et la République s’ouvre au respect de l’autre. Si les Juifs vont maintenir des liens de sociabilité commun, ils seront citoyens aussi bien dans l’espace public que dans l’espace privé.
Mais le régime de Vichy va venir rompre le contrat républicain établi entre les Français juifs et la République. Le doute va s’installer durablement et la mémoire des années noires demeure toujours vive. C’est dans cette société française bouleversée dans ces valeurs, que des institutions comme le Crif vont naître et se proposer d’être l’interprète du judaïsme en France devant les pouvoirs publics avec une très grande prudence.
Pierre Birnbaum a conclu son propos en rappelant que le déclin de l’État fort à la française ainsi que celui d’une citoyenneté exigeante […] ouvrent un avenir incertain » et les nombreux attentats et attaques contre les Français juifs risquent de réduire la place des Juifs à une communauté.
Artículos Relacionados: