Dans un article publié par le quotidien basé à Londres Al-Arab, le journaliste marocain Said Nasheed a dénoncé la politique des régimes arabes envers le terrorisme et l’extrémisme. Il a écrit que, pendant des années, ces régimes ont adopté une politique apaisante et conciliante envers les terroristes et les éléments radicaux, dans le but d’éviter les conflits internes dans leurs pays, et que cela a eu pour conséquence que le monde arabe a perdu la guerre contre le terrorisme. Selon lui, il ne s’agit pas seulement d’une défaite militaire ou politique de ces régimes, mais de la défaite d’une culture tout entière. Extraits : [1]
Cela ne fait aucun doute, nous sommes sur le point de perdre la guerre contre le terrorisme. Nous allons la perdre avant même de l’avoir commencée. Nous ne l’avons clairement pas encore commencée, du moins pas avec le niveau minimal de détermination requis. Rien n’indique notre désir de rejoindre à cette guerre dans un avenir proche ou lointain. Pire encore, lorsque nous nous décidons effectivement à agir, nous faisons le contraire [de ce qui est nécessaire]… Chaque fois que nous avons voulu changer les programmes scolaires, en particulier les programmes religieux, les extrémistes parmi nous ont levé la voix et incité [contre cette intention]. Et qu’avons-nous fait ? Nous avons tremblé de peur et rédigé des programmes scolaires encore pires que les anciens, afin d’éviter tout conflit interne et de le laisser en sommeil jusqu’à la prochaine crise. Nous faisons le contraire [de ce qui est nécessaire].
Dans la guerre que les [organisations] de terrorisme mondial tafkiries nous ont déclarée, les régimes locaux tiennent à conserver la même politique : une [politique] qui étouffe [toute] culture, pensée, connaissance, créativité et débat public, en laisse les intellectuels seuls dans l’arène, à combattre la « sainte ignorance » sans le moindre soutien…
Parfois les régimes [arabes] n’ont pas même de scrupules à trahir les intellectuels éclairés et à les poignarder dans le dos, en les utilisant comme boucs émissaires pour apaiser les gardiens des maisons de prière, dont l’appétit est insatiable…
Notre disposition [à combattre le terrorisme] diminue régulièrement. D’année en année, le nombre des prédicateurs double et celui des intellectuels, des artistes et des poètes diminue. Le nombre des organisations qui se consacrent au prêche [religieux] augmente, tandis que celui des associations dévouées au développement et à la culture baisse. Chaque jour, un nouveau lieu de culte est construit, parfois sans aucune nécessité, tandis que les théâtres, les cinémas et centres culturels ferment leurs portes. Après chaque tentative de réforme, davantage de programmes religieux rejettent la rationalité, et parfois les lois [finalement] adoptées pour combattre le terrorisme sont [en fait] destinées à écraser les progressistes. Aussi, comment voulez-vous gagner la guerre contre le terrorisme ?
Nous avons quasiment perdu la bataille, car nous ne parvenons pas à comprendre sa nature, ou pour être plus précis, car nous nions sa [véritable] nature. Contrairement à ce que certains pensent, par exemple l’administration Obama, ce n’est pas une guerre contre certains dirigeants charismatiques, qui peut être remportée en éliminant ces dirigeants par des mesures militaires ou sécuritaires… Il s’agit plutôt d’une guerre contre une conception très dangereuse, se manifeste de diverses manières… Ce n’est pas un ennemi extérieur, qui peut être vaincu en restaurant notre unité interne, mais plutôt un ennemi qui vient de l’intérieur, de notre sein. C’est davantage une guerre des idées qu’une campagne militaire…
Aujourd’hui, nous devons reconnaître que nous avons perdu la guerre contre le terrorisme. Nous l’avons perdue à l’instant où nous avons laissé des forces extérieures la mener, et attendu que celles-ci échouent pour pouvoir les accuser [de cet échec]. Nous nous sommes contentés d’innocenter [les coupables], en niant [leur culpabilité] et avons même conclu des accords avec les terroristes, afin de ne pas avoir à reconnaître notre défaite… Ce n’est pas simplement une défaite militaire ou politique de la part des régimes, mais une défaite d’une culture tout entière.
Note :
[1] Al-Arab (Londres), 27 décembre 2016.
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