Déclarations contradictoires du conseiller d’Abbas pour les affaires religieuses, Mahmoud Al-Habbash, sur la mosquée Al-Aqsa, Jérusalem et le conflit israélo-palestinien

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Mahmoud Al-Habbash, qadi (juge de la charia) suprême de l’Autorité palestinienne, et conseiller pour les affaires religieuses et islamiques du président de l’Autorité palestinienne (AP) Mahmoud Abbas, a fait de nombreuses déclarations sur différents médias concernant le conflit israélo-palestinien et sur Jérusalem, Al-Aqsa et les liens des Juifs avec la Ville sainte.

D’un côté, plusieurs de ses déclarations apparaissent comme modérées. Ainsi, il a affirmé que les Juifs auraient le droit de prier dans le secteur de la mosquée Al-Aqsa sous souveraineté palestinienne, et condamné le terrorisme, affirmant qu’il portait atteinte aux Juifs comme aux Arabes.[1] Al-Habbash a également fermement condamné le Hamas, auquel il appartenait jusqu’en 1994, qualifiant ses membres de « kharijites » [2] et les accusant de sédition, [3] et qualifiant le mouvement islamique de pire ennemi que l’occupation israélienne.[4] Il a même laissé entendre à une occasion que l’assassinat du dirigeant du Hamas Ismail Haniya serait une action approuvée par l’islam.[5] En outre, Al-Habbash a rencontré des représentants officiels et officieux d’Israël, et des rabbins en Israël et à l’étranger, notamment dans le cadre de sa participation à la Commission de l’OLP pour les relations avec la société israélienne, qui œuvre en vue de promouvoir le discours politique palestinien au sein du public israélien.[6] Certaines de ses déclarations modérées sont prononcées devant de tels publics, et dans les médias israéliens.

Toutefois, les déclarations extrémistes d’Al-Habbash sont encore plus fréquentes que ses déclarations modérées. Ainsi, il a revendiqué les droits exclusifs des Palestiniens sur Jérusalem et ses lieux saints, et appelé au djihad pour le salut d’Al-Aqsa. Il a également comparé Israël à l’Etat islamique (EI), et le processus politique israélo-palestinien au traité de Hudaybiyya, suggérant ainsi qu’il s’agissait d’un cessez-le-feu provisoire, qui serait maintenu tant qu’il servirait les intérêts musulmans. Il a également remis en cause le fait que les auteurs des attentats du 11 Septembre étaient des musulmans. La plupart des déclarations extrémistes d’Al-Habbash ont été émises dans des sermons du vendredi à travers des mosquées de Cisjordanie, y compris la mosquée du quartier général présidentiel de Ramallah, dans laquelle prie le président de l’AP Mahmoud Abbas, et dans des déclarations aux médias palestiniens.


On trouvera ci-dessous certaines des déclarations d’Al-Habbash faites entre 2010 et 2016 :

Les Juifs seront autorisés à prier sur le site d’Al-Aqsa sous souveraineté palestinienne ; les Juifs n’ont aucun droit sur Jérusalem et sur Al-Aqsa

Dans une interview à la télévision israélienne le 11 février 2014, Al-Habbash a accueilli favorablement la perspective de voir des Juifs prier sur le site d’Al-Aqsa lorsqu’elle serait sous souveraineté palestinienne : « Tout Juif qui veut prier à Al-Aqsa est le bienvenu. La politique est une chose, et la religion une autre. Mais tout cela se produira sous la souveraineté palestinienne. » [7] Toutefois, dans des déclarations récentes, Al-Habbash a catégoriquement rejeté le droit des Juifs à prier sur le site d’Al-Aqsa. En réaction à une déclaration du président de la commission des affaires étrangères et de la défense de la Knesset, Avi Dichter, le 15 août 2016, selon laquelle le Mont du Temple ne deviendrait pas comme La Mecque et Médine (à savoir un site ouvert aux seuls musulmans), Al-Habbash a déclaré : « Ces déclarations reflètent la folie israélienne consistant à judaïser Jérusalem. Jérusalem est une terre arabe palestinienne, et la mosquée bénie d’Al-Aqsa, avec toutes ses composantes et son enceinte de 14,8 hectares, est un droit exclusif islamique-arabe-palestinien, et les Juifs n’y ont pas le moindre droit. » [8]

Le 13 octobre 2016, l’UNESCO a adopté une résolution caractérisée dans les médias palestiniens comme décrivant le site d’Al-Aqsa et le Mur occidental comme « un site exclusivement musulman, avec lequel les Juifs n’ont pas le moindre lien ». Al-Habbash a réagi à l’adoption de cette résolution en déclarant : « Cette résolution est une représentation exacte de la vérité et de l’histoire, au vu de toutes les mesures prises par les gouvernements de l’occupation [israélienne], l’un après l’autre, avec tous leurs organes politiques, économiques et sécuritaires, pour falsifier et judaïser [Jérusalem]. » Il a attribué l’adoption de cette résolution à la politique internationale d’Abbas et a appelé la communauté internationale et les institutions juridiques mondiales à faire pression sur le gouvernement israélien pour qu’il se retire de Jérusalem et de tous les lieux saints musulmans et chrétiens.[9]

Le conflit israélo-palestinien n’est pas de nature religieuse ; il faut condamner la violence ; tous les musulmans doivent mener le djihad pour le salut de Jérusalem et d’Al-Aqsa

Le 13 octobre 2016, Al-Habbash a assisté à une rencontre entre de hauts-dirigeants palestiniens et israéliens, organisée par le président israélien Reuven Rivlin à sa résidence. A l’issue de la rencontre, qui était consacrée à dénoncer la violence et à promouvoir la paix entre les deux peuples, les participants ont publié la déclaration suivante : « Dieu a créé la vie et ordonné la vie. Par conséquent, nous dénonçons l’assassinat de personnes innocentes et toute espèce d’agression contre autrui. Nous pensons que le fait de tuer délibérément ou de tenter de tuer des innocents relève du terrorisme, que ces actes soient commis par des musulmans, des Juifs ou autres. Dans cet esprit, nous encourageons tous les membres de notre peuple à œuvrer en vue d’une paix juste, du respect mutuel pour la vie humaine, du maintien du statu quo sur les Lieux saints et de l’éradication de la haine religieuse. » [10]

Le 17 avril 2014, Al-Habbash, s’exprimant sur la chaîne d’information palestinienne PNN, avait condamné l’attentat à l’arme à feu intervenue quelques jours auparavant à Hébron, au cours de laquelle un soldat israélien avait été tué. Il avait déclaré : « Nous condamnons tous les actes de violence, qu’ils soient dirigés contre des Palestiniens ou des Israéliens. Le sang palestinien est comme le sang israélien. C’est du sang humain précieux et personne ne souhaite voir quiconque se faire tuer… Notre position constante en tant que Palestiniens, indépendamment de la position israélienne, est que nous sommes opposés au meurtre de quiconque. Je l’ai dit [dans le passé], et c’est la position palestinienne inchangée. En d’autres termes, nous n’avons pas besoin de le répéter chaque jour. » [11]

En mai 2016, assistant à une conférence sur le dialogue interreligieux à Haïfa, Al-Habbash a donné une interview au portail d’information arabe israélien Bokra, dans laquelle il a de nouveau adopté une ligne modérée. Il a affirmé que le conflit israélo-palestinien n’était « pas un conflit religieux, mais politique, visant à appliquer les droits nationaux des Palestiniens, qui sont ancrés dans les résolutions internationales ». Et d’ajouter : « Les causes de la violence et de la haine dans notre région ne sont liées ni à la religion ni aux relations entre les musulmans et les Juifs ou entre les musulmans et les chrétiens, mais plutôt à l’occupation israélienne. » [12]

Toutefois, en dépit de ses déclarations concernant la nécessité de reconnaître la nature politique, et non religieuse, du conflit, nombre des discours d’Al-Habbash et de ses sermons sur Jérusalem font référence aux questions politiques en termes religieux et appellent à une action musulmane, et même au djihad, pour le salut de Jérusalem. Selon une information de l’agence de presse palestinienne Wafa datée du 19 août 2016, dans un sermon prononcé au centre islamique de Sao Paulo, alors qu’il était en visite pour assister à la 29e Conférence des musulmans d’Amérique latine et des Caraïbes, Al-Habbash a « appelé à sauver Jérusalem, ses lieux saints et ses habitants » et fait observer que « le crime de la mise à feu d’Al-Aqsa et le fait qu’elle soit prise en otage jusqu’à ce jour, oblige tous les musulmans à venir [sauver] la Ville sainte ».[13]

Dans une interview donnée le 6 novembre 2014 à la télévision de l’AP, Al-Habbash a affirmé que mener le djihad pour le salut d’Al-Aqsa était une « obligation individuelle, incombant à chaque musulman, homme ou femme, dans le monde entier », et a averti que les flammes d’une guerre de religion pourraient « atteindre les Etats-Unis, Washington, l’Europe, l’Asie, l’Afrique et partout ailleurs ». Dans un sermon du 7 novembre 2014 à Ramallah,  en présence du président de l’AP, Mahmoud Abbas, Al-Habbash a déclaré que la bataille en cours à Jérusalem est « la phase finale, après laquelle nos drapeaux flotteront… sur les minarets de Jérusalem, sur ses églises et sur ses dômes, ses collines, ses allées et ses maisons ».[14]

Dans un discours diffusé par la télévision de l’AP le 13 janvier 2014, Al-Habbash a déclaré que le djihad devait être dirigé vers Jérusalem, et non vers la Syrie. Il a souligné que « Jérusalem attend encore. Jérusalem est la direction. Jérusalem est l’adresse », ajoutant que « des mains diaboliques » mènent « un jeu pervers » destiné à affaiblir la nation islamique et à « détourner le compas de sa vraie direction ».[15]

En sus d’appeler les musulmans à venir à l’aide de Jérusalem, Al-Habbash a effectivement soutenu l’incitation à la haine et la guerre contre les Juifs. Le 29 janvier 2010, il devait prononcer un sermon du vendredi à Naplouse, mais est arrivé en retard et s’est contenté de s’asseoir dans le public et de prononcer une courte déclaration après le sermon. Ce sermon accusait les Juifs d’être les « ennemis d’Allah » et comportait des déclarations qualifiant le conflit israélo-palestinien de religieux et non de politique, comme « notre inimitié avec les Juifs est une affaire de foi plus qu’une question liée à l’occupation et à la terre » ; « le Prophète Mohammed a dit : vous combattrez les Juifs, et vous les tuerez » ; « Cette terre ne sera libérée que par le djihad ». Après le sermon, Al-Habbash a exprimé son soutien à ce qui venait d’être dit, et ajouté : « Les Juifs seront toujours les Juifs. Même si les ânes cessent de braire, que les chiens cessent d’aboyer, les loups de hurler et les serpents de mordre, les Juifs ne cesseront pas d’être hostiles aux musulmans. »[16]  

Le processus de paix doit être renouvelé ; Le processus de paix est comme l’accord de Hudaybiyya ; L’EI et Israël sont les deux faces de la même pièce

Al-Habbash a fait des déclarations contradictoires sur les négociations israélo-palestiniennes également. Ainsi, lors d’une récente rencontre avec le vice-ministre Ayoub Kara et avec Mohammed Al-Madani, dirigeant de la Commission de la communication avec la société israélienne de l’OLP, Al-Habbash a appelé à reprendre le processus de paix. [17] Dans le même temps, il a comparé les négociations israélo-palestiniennes au traité de Hudaybiyya, signifiant qu’il s’agissait d’un cessez-le-feu provisoire, qui serait maintenu tant qu’il servirait les intérêts des musulmans. Dans un sermon du 17 juillet 2013 diffusé à la télévision de l’AP, il a déclaré : « L’accord pour reprendre les pourparlers avec Israël est similaire au traité de Hudaybiyya ».

Dans un sermon du vendredi prononcé le 20 novembre 2015 au quartier général de la présidence à Ramallah, Al-Habbash a appelé le monde à coopérer pour combattre le terrorisme en établissant une « alliance morale » (hilf fudhoul) fondée sur le soutien aux opprimés et sur la fin des guerres – similaire à l’alliance commerciale pré-islamique à la signature de laquelle Mohammed avait assisté avant de devenir prophète.[18] Le terrorisme, a déclaré Al-Habbash, n’a pas de religion ni de nationalité, et ne doit pas être attribué à l’islam, car l’islam rejette toute tuerie hâtive et aveugle. Et d’ajouter que « le récent assassinat de dizaines de personnes innocentes en France, au Liban, au Sinaï et en Arabie saoudite est le même terrorisme de meurtres et d’assassinats commis par l’occupation israélienne depuis des décennies, et qu’elle continue de commettre à Hébron, Jérusalem et en Palestine occupée contre le peuple palestinien désarmé. C’est du terrorisme au plein sens du terme. »

Al-Habbash a également affirmé que « le traitement sélectif du terrorisme [dans le monde] est l’une des raisons de son étendue et de son expansion », et que l’occupation israélienne est le principal auteur du terrorisme. Il a déclaré : « Depuis 67 ans [depuis 1948], le peuple palestinien est victime du terrorisme israélien, et personne n’a levé le petit doigt contre cela. Aujourd’hui, le monde entier affronte le même terrorisme, la même agression et la même oppression, et par conséquent il est temps que le monde reconnaisse la réalité et adopte des positions équitables pour protéger sa sécurité – car l’organisation terroriste Etat islamique et l’occupation israélienne sont les deux faces d’une même pièce concernant le terrorisme. » [19]

Lien vers l’article en anglais

Notes :

[1] Pfnp.net, 17 avril 2014.

[2] Les Kharijites étaient un groupe qui a fait sécession de l’armée du Calife Ali bin Abou Taleb et ont constitué le premier groupe d’opposition religieuse au sein de l’islam. Aujourd’hui, ce terme est souvent employé de manière péjorative pour désigner des individus ou des groupes extrémistes et violents.

[3] Arabi21. com, 23 mai 2015.

[4] Voir par exemple MEMRI TV Clip n° 3884, « PA Religious Affairs Minister Mahmoud Habbash: Hamas « More Dangerous Enemy than Israeli Occupation, » 2 juin 2013.

[5] Voir par exemple MEMRI TV Clip n° 2412, « PA Minister of Religious Endowments Mahmoud Al-Habbash Implies that Islam Sanctions the Killing of Hamas Leader Ismail Haniya, » 5 mars 2010.

[6] Amad.ps, 23 octobre 2016. Concernant la commission, Al-Habbash a déclaré qu’elle « s’acquittait d’une tâche importante, à savoir expliquer la position palestinienne à tous les secteurs de la société israélienne. Il est important qu’ils entendent nos revendications et nos arguments de notre bouche, et [de toutes façons] nous n’avons rien à perdre » (maannew.net, 27 août 2016). Al-Habbash a également pris part à une conférence interreligieuse à l’Université de Haïfa les 13-14 avril 2011, intitulée « La foi religieuse et le conflit israélo-arabe » (derasat.ara-star.com, 20 avril 2016). En sus, il devait participer à une conférence sur le conflit israélo-palestinien à l’Université de Jérusalem le 1er mars 2016, aux côtés du député israélien Ofer Shelah du parti Yesh Atid, mais a finalement annulé sa participation (amnpress.com, 28 février 2016 ; safa.ps, 1er mars 2016). Le 1er décembre 2014, il a prononcé un discours sur l’importance de la tolérance religieuse dans le conflit israélo-palestinien (alresalah.ps, 1er décembre 2014).

[7] Fatehorg.ps, 12 février 2014.

[8] Al-Yawm Al-Sabi’ (Egypte), 16 août 2016 ; Wafa.ps, 16 août 2016.

[9] Maannews.net, 18 octobre 2016.

[10] Washingtoninstitute.org. 13 octobre 2016.

[11] Fpnp.net, 17 avril 2014.

[12] Bokra.net, 9 mai 2016.

[13] Wafa.ps, 20 août 2016.

[14] Voir MEMRI TV Clip n° 4592 – PA Official Mahmoud Habbash Calls for Jihad, Warns of Religious War, 6-7 novembre 2014.

[15] Voir MEMRI TV Clip n° 4110 – Palestinian Minister Mahmoud Habbash: Jihad Must Be Directed Toward Jerusalem, Not Syria, 13 janvier 2014.

[16] Voir Dépêche spéciale de MEMRI n° 2784, Official Palestinian Authority Friday Sermon on PA TV: ‘The Jews Are the Enemies of Allah… Our Mutual Enmity With Them is a Matter of Faith More Than an Issue Pertaining To Occupation and Land’; ‘The Prophet Muhammad Said: You Will Fight the Jews, and You Will Kill Them’; ‘This Land Will Only Be Liberated Through Jihad, 2 février 2010 ; MEMRI TV Clip n° 2367 – Antisemitic Sermon on PA TV: Even If Donkeys Cease to Bray, the Jews Will Not Cease to Be Hostile to the Muslims, 29 janvier 2010.

[17] Kofiapress.net, 30 octobre 2016.

[18] L’alliance pour un commerce équitable hilf al-fudhoul a été signée par les hommes de la tribu de Quraysh à La Mecque en 570. Mahomet, qui n’était pas encore prophète, ayant assisté à la signature de l’alliance et joué un rôle essentiel dans sa rédaction, celle-ci a eu un impact significatif sur l’éthique islamique.

[19] Al-Hayat Al-Jadida (AP), 20 novembre 2015.

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El Instituto de Investigación de Medios de Información en Medio Oriente (MEMRI) explora el Medio Oriente a través de los medios informativos de la región.

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