Le 28 juin 2018, MEMRI a traduit et mis en ligne un sermon en arabe de Mohamed Tataï, imam de Toulouse, diffusé sur le compte Youtube de la Grande Mosquée de Toulouse le 30 janvier 2018. Dans ce sermon, Tataï reprend un hadith antisémite bien connu, qu’il cite en ces termes : « [Le prophète Mahomet] nous a parlé de la bataille finale et décisive : ‘Le Jour du jugement n’arrivera que lorsque les musulmans combattront les juifs. Les juifs se cacheront derrière les pierres et les arbres, et les pierres et les arbres diront : ‘ô musulman, ô serviteur d’Allah, un juif se cache derrière moi, viens le tuer’, sauf l’arbre Gharqad, qui est l’un des arbres des juifs’. »[i]
La révélation par MEMRI de l’usage de ce hadith antisémite dans une mosquée de France a suscité l’émoi et de nombreuses réactions dans la presse, Le Monde se posant même la question d’une « mauvaise traduction » ou d’une « manipulation » de MEMRI, ce qui semble indiquer que Le Monde ignore l’existence de ce hadith pourtant très connu et fréquemment cité dans les mosquées.[ii] Pour Mohamed Sifaoui en revanche, directeur de la revue Contre-Terrorisme, et l’un des premiers à avoir alerté sur la menace islamiste, il y a de cela plusieurs décennies, la traduction de MEMRI est « totalement exacte » et le CFCM ne devrait plus permettre à Mohamed Tataï de prêcher.[iii]
Suite à la traduction et au sous-titrage de la vidéo par MEMRI, l’UEJF (Union des étudiants juifs de France) a entrepris de poursuivre Mohamed Tataï en justice pour « incitation à la haine raciale », arguant : « Pour l’UEJF, cet appel au meurtre des juifs est particulièrement inquiétant, à fortiori lorsqu’il est commis à Toulouse, dans la ville où Mohamed Merah a tué des enfants juifs à bout portant dans l’école d’Ozar Hatorah, le 19 mars 2012. L’UEJF dépose plainte pour incitation à la haine raciale contre Mohamed Tataï et appelle le Parquet à ouvrir une enquête et le ministère de l’Intérieur à fermer ladite mosquée ». [iv]
Face à la polémique, Dalil Boubakeur, recteur de la Grande Mosquée de Paris, a convoqué Mohamed Tataï. Le 2 juillet 2017, le site de la Mosquée de Paris[v] met en ligne un communiqué de presse déclarant que l’imam Tataï a été reçu par un conseil d’imams pour écouter son explication quant à l’usage d’ « un hadith dans un prêche consacré à l’eschatologie des fins dernières et à la souffrance du peuple juif ». Le communiqué rapporte que « l’imam Mohammed Tataï proteste vivement de sa bonne foi. Il s’excuse profondément auprès de ses amis de la communauté juive de Toulouse et de France de l’interprétation décontextualisée de ses propos. » Les excuses de Mohamed Tataï consistent donc à justifier les propos tenus dans le sermon, propos qui auraient été « mal interprétés » et « décontextualisés ». Le communiqué est signé par le recteur de la Grande Mosquée, Dalil Boubakeur.
Le 3 juillet, la chaîne télévisée algérienne Ennahar met en ligne une vidéo rapportant que la Grande Mosquée de Paris disculpe l’imam de la mosquée de Toulouse des accusations d’incitation à la haine, reprenant l’argument selon lequel le « hadith a été sorti de son contexte ».[vi]
Le 5 juillet 2018, La Grande Mosquée de Toulouse vole aussi au secours de Mohamed Tataï, déplaçant le problème vers un éventuel amalgame qui aurait été commis entre sionisme et judaïsme, amalgame dont il n’a pourtant pas été question dans cette polémique : « Suite à la polémique autour du sermon du 15 décembre 2017, nous publions une traduction de quelques extraits. Ces extraits montrent clairement qu’aucun amalgame n’est fait entre la mouvance sioniste et le judaïsme en tant que religion ou les juifs en tant que peuple. »[vii]
Le 5 juillet, on apprend que le Bureau national de vigilance contre l’antisémitisme (BNVCA) a porté plainte contre Dalil Boubakeur, recteur de la Mosquée de Paris, pour avoir pris la défense de l’imam Tataï.[viii]
Dans une autre vidéo mise en ligne par la chaîne télévisée algérienne Ennahar le 7 juillet 2018[ix], le ministre Algérien des Affaires religieuses en personne vient au secours de Tataï, arguant que Tataï est un homme pur qui ne violerait pas les lois de son pays de résidence. Il apporte son soutien à Tataï, estimant que les « médias extrémistes » devaient cesser de porter atteinte à l’islam. Notons que Mohamed Tataï est algérien et que la mairie de Toulouse l’aurait aidé à se procurer un terrain pour y construire sa nouvelle mosquée avec le concours financier de l’Algérie et du Koweït.[x]
Notes :
[i] http://memri.fr/2018/06/28/mohamed-tatai-imam-a-toulouse-cite-un-hadith-antisemite-et-des-propheties-annoncant-la-fin-prochaine-disrael/
[ii] Le Monde, 30 juin 2018
[iii] Consulter la page Twitter de Mohamed Sifaoui : https://twitter.com/Sifaoui
[iv] http://uejf.org
[v] Site de la Mosquée de Paris : http://www.mosqueedeparis.net/mosquee-de-toulouse-mise-au-point-de-limam-tatai/
[vi] Ennahar TV, Youtube, le 3 juillet 2018
[vii] Grande Mosquée de Toulouse sur YouTube, 5 juillet 2018
[viii] Site de La Ligue de Défense juive, 5 juillet 2018
[ix] Ennahar TV sur YouTube, 7 juillet 2018
[x] La Dépêche, 10 juin 2018
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